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Méthodes de protection

Si l'on veut contrôler efficacement les attaques de Didymella bryoniae sur cucurbitacées, il est essentiel de mettre en place  des méthodes de lutte complémentaires soit préventivement ou dès qu'apparaissent les tout premiers symptômes. Il convient aussi d’être particulièrement vigilent pour les cultures situées en zones humides ou sous abri. Notons que les cucurbitacées sont plutôt prédisposées aux attaques de ce champignon parasite, ceci à cause d'un feuillage plutôt dense et de la réalisation continuelle de blessures lors de la taille et des cueillettes. Ajoutons qu’il est indispensable de bien contrôler les lésions sur feuilles et sur tiges si l’on ne veut pas subir de fortes attaques sur fruits au champ, comme en cours de stockage et de conservation.
 
  • En cours de culture

 

Sous abris, il convient que les producteurs soient conscients de l'influence du climat de la serre sur le développement de la maladie, et donc de l'importance de sa gestion. En les chauffant et les ventilant, le producteur contribue à y réduire l'humidité relative et, bien souvent, évite la présence d'eau libre sur les plantes et le phénomène de guttation. Par exemple, dans des cultures approchant de la récolte, où l'on maintient des températures "élevées" durant la nuit, la maladie se développe beaucoup moins. Cette mesure leur paraîtra souvent onéreuse. C'est à eux de décider dans quelle mesure elle est applicable en fonction de la conjoncture économique du moment. Bien sur les irrigations par aspersion sont à proscrire.

En plein champ, il est souhaitable d'éviter que de l'eau soit présente trop longtemps sur les plantes ou à proximité, par exemple sur le sol. Pour cela, il convient d'arroser plus souvent, en apportant moins d'eau à la fois. Les irrigations par aspersion seront effectuées le matin ou en cours de journée, mais jamais le soir, ceci afin que les plantes ressuient rapidement.

Les fruits altérés, les débris d'effeuillage et d'ébourgeonnage seront rapidement sortis des serres et des champs, détruits ou compostés.

La lutte chimique, pour être efficace, doit être relativement intensive, en particulier sous abri. Il y a lieu de réaliser des pulvérisations chaque semaine** (e-phy). L'azoxystrobine devra être utilisé avec parcimonie car des souches résistantes ont été signalées assez rapidement après son utilisation aux Etats-Unis. Rappelons que la lutte chimique est parfois peu satisfaisante sur Cucurbitacées, car les plantes ont une croissance très rapide et les partie des plantes récemment formées ne sont pas toujours bien protégées. Pour être efficaces, les traitements doivent être renouvelé fréquemment, souvent tous les 7 jours. Ajoutons que le bicarbonate d'ammonium associé ou non à une huile minérale aurait conféré une certaine protection à des plantes confrontées à ce champignon.

Les lésions débutant sur tiges peuvent être badigeonnées avec une bouillie fongicide épaisse, constituée de l'association de plusieurs matières actives.

A la récolte, les fruits seront manipulés avec soin afin d'éviter les blessures, et il conviendra de les faire cicatriser . Ils seront par la suite entreposés à basses températures (à 12°C pour le concombre), ceci afin de réduire le développement de la pourriture noire sans affecter leur durée de conservation. Une attention particulière devra être apportée aux courges d’hiver et aux citrouilles afin de leur éviter au maximum des blessures. Elles seront séchées dans de bonnes conditions afin de favoriser le durcissement de leur peau et la cicatrisation. Sous des conditions de séchages correctes, les zones blessées cicatrisent et forment des tissus liégeux. Le séchage à 20-25°C ou plus, et pendant 1 à 2 semaines, durcit la peau. Leur stockage pourra avoir lieu à des températures comprises entre 11-16°C (l’optimum est à 13°C), avec une humidité relative située autour de 60 %).

En fin de culture, les débris végétaux seront éliminés des abris et des champs, transportés loin des parcelles et détruits. En plein champ, ils peuvent aussi être enfouis profondément dans le sol.
 
  • Culture suivante

 

Dans le cas des cultures "traditionnelles" de plein champ, il convient d'utiliser des graines saines. Celles-ci ne doivent être récupérées qu'à partir de fruits sains, ou exceptionnellement très partiellement pourris, sinon elles seront contaminées et des attaques très précoces seront à redouter. Les graines pourront être désinfectées. L’acide peroxyacétique, suivi d'un le séchage dans une étuve, présenterait une certaine efficacité.

Des rotations culturales d'au moins deux à trois années avec des cultures non hôtes seront mises en oeuvre. Notons qu’une étude menée dans le Maryland a montré que des citrouilles (Cucurbita pepo) cultivées sur un sol non travaillé recouvert de Vesce velue (Vicia villosa) permettait de réduire significativement l’incidence sur fruits de la pourriture noire, ceci comparativement à des cultures sur sol nu. Le sol sera bien drainé et on pourra réduire la densité de plantation afin d'obtenir un couvert végétal plus aérée. Pour la même raison, les parcelles seront orientées dans le sens du vent dominant.

Il sera primordial d'utiliser des graines de qualité et de surveiller l'état sanitaire des plantes.

Sous abri, si l'on réalise des monocultures de concombres en pleine terre, une désinfection du sol à la vapeur ou avec un fumigant sera effectuée. La solarisation semble être employée également.
La qualité du film plastique des abris influencerait les épidémies de chancre gommeux notamment sur pastèque . Ainsi, les films absorbant les UV limiteraient fortement les dégâts de D. bryoniae, ceci comparativement aux films transparents ordinaires.
Les parois des serres seront aussi désinfectées avec un produit autorisé pour ce type d'usage (e-phy).
La maîtrise du climat de l'abri (qui ne favorisera pas la formation de films d'eau sur les plantes) et le contrôle de la fertilisation semblent des fondements indispensables à une protection préventive efficace.
On évitera aussi tout stress aux plantes.

Des applications préventives de fongicides seront réalisées avec les matières actives citées précédemment (e-phy). Les autres bioagresseurs des cucurbitacées devront être parfaitement contrôlés car le développement de certains (notamment l'oïdium  pour lequel on pourra utiliser une variété résistante) sensibiliserait les plantes à D. bryoniae.

Les débris de végétation accidentellement présents ou maintenus à proximité des serres sont aussi à l'origine des contaminations, notamment par l'intermédiaire des ascospores qui se forment sur ceux-ci, dès que les conditions climatiques le permettent. Il convient d'être aussi vigilant pour les proches abords que pour les abris.

Bien que des résistances variétales aient été mises en évidence ou parfois employées, aucun cultivar de cucurbitacées commercialisé actuellement en France n'est résistant à ce champignon.
A titre d’exemple, citons quelques génotypes signalés comme plus ou moins résistants* chez les cucurbitacées :
- pastèque : PI 164248, Pi 189225, PI 244019, PI 254744, PI 271771, PI 279461, PI 296332, PI 379243, PI 482276, PI 482284, PI 482322, PI 482379, PI 490383 et PI 526233 ;
- melon : PI 266934, PI 266935, PI 157082 et PI 511890, PI 266934, plusieurs espèces de Cucumis (C. ficifolius, C. anguria - concombre des Antilles, C. figarei, C metuliferus - concombre métulifère, C. zeyheri, C. myriocarpus) ;
- citrouille : cultivars ‘Kirameki’, ‘Shelper’, ‘Ikky’ et ‘Agroceres’, ainsi que ‘Gherkin’ ;
- concombre : PI 200815, PI 390243, LJ 90430, PI 279469 et PI 432855, PI 299568 (Cucumis myriocarpus), PI 282450 (C. zeyheri), PI 299572 (C. myriocarpus) et PI 233646 (C. anguria), et les cultivars little john, transamerica et poinsett 76, marketer...
- courges : des résistances ont été constatées chez Cucurbita martineziik, C. moschata (201474 et 438579) et C. pepo (10107, 358969 et 442312) ;
- courge cireuse (Benincasa hispida).

Notons que le greffage sur des porte-greffes résistants à D. bryoniae limiterait les dégâts de ce champignon, notamment en empêchant les attaques au collet et sur la partie basse de la tige. Il conviendra de se méfier tout de même lors de la réalisation des greffes, car les blessures réalisées peuvent constituer des portes d’entrée pour ce champignon s’il est présent dans l’environnement du chantier de greffage.

Quelques bio-pesticides ont été expérimentés sur D. bryoniae in vitro et au champ dans plusieurs pays du monde, ceci avec plus ou moins de succès : Trichoderma spp., Streptomyces spp....

* Méfiance, des comportements contradictoires à l’égard de D. bryoniae ont pu être observés pour un même matériel végétal par des expérimentateurs différents

** Lutte chimique : Le nombre de pesticides disponibles pour un usage donné évoluant en permanence, nous vous conseillons de toujours confirmer votre choix en consultant le site e-phy du ministère de l’agriculture et de la pêche qui est un catalogue en ligne des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages, des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en France. Cette remarque est également valable pour tous les produits biologiques à base de micro-organismes ou de substances naturelles.
Dernière modification : 15/02/2013
  • Auteurs :
  • D Blancard (INRAe)
  • V Mayet (INRA)