Polyphagotarsonemus latus (Banks)
Tarsonème - acariose déformante
Polyphagotarsonemus latus, appelé communément tarsonème (broad mite), appartient à la classe des Arachnida et à la famille des Tarsonemidae. C’est un minuscule acarien déjà dommageable en très faible quantité, et extrêmement difficile à observer à l’œil nu, sa taille étant 4 à 5 fois plus petite que celle des acariens tétraniques.
P. latus est très polyphage, il a été signalé chez des espèces végétales appartenant à plus de 60 familles botaniques. Il parasite de nombreuses espèces cultivées fruitières (fruit de la passion, manguier, papayer vigne, citronnier, pommier, poirier), légumières (divers haricots, betterave, concombre, melon, courges, pastèque…) et surtout les Solanacées (tomate, mais également aubergine, piment et pomme de terre), ornementales (azalée, bégonia, chrysanthème, cyclamen, dahlia, géranium, gerbera, impatiens, lantana, pittosporum, violette africaine, zinnia…) et diverses autres plantes cultivées en zones tropicales à subtropicales : cacaoyer, avocatier, théier, caféier, cotonnier. Certaines plantes adventives l’hébergent également, notamment Bidens pilosa...
Cet acarien est très cosmopolite, il est rapporté sur de nombreux continents et dans de nombreux pays des zones tropicales et sub-tropicales (Australie, Asie, Afrique, Amériques du Nord et du Sud, Europe – surtout dans les serres). Il n’est pas présent en France, mais fréquent dans nombreux départements et territoires d’Outre-Mer. Il semble très dommageable sur poivron en Espagne sous serre, il a notamment été signalé en Angleterre dans les années 80 sur tomate.
Notons que cet acarien n’est pas vecteur de virus.
Il se cache au cœur des plantes, au niveau de l’apex et des bourgeons surtout.
- Nature des dégâts
Les piqûres réalisées par P. latus sont à l’origine de déformations foliaires plutôt marquées et spectaculaires, les bourgeons et les jeunes feuilles étant particulièrement déformés. Notons que ces symptômes rappèlent ceux provoqués par les herbicides de type hormone sur tomate, et à un moindre dégré ceux des certaines viroses.
Les feuilles s’enroulent fortement, elles sont aussi plissées, plus épaisses et rigides. Elles présentent parfois une teinte bronze à brunâtre, et leur face inférieure à des reflets métalliques. Des zones de tissus brunâtres et subérisés apparaissent sous les feuilles, sur les pétioles…
Certaines plantes parasitées précocement ont leur croissance bloquée.
Les inflorescences peuvent brunir ou prendre une teinte bronze, voire tomber.
Les fruits sont superficiellement liégeux, et présentent parfois des micro-éclatements plus ou moins marqués. Ces symptômes ne sont pas sans rappeler ceux occasionnés par Aculops lycopersici responsable de l’acariose bronzée.
- Biologie
- Formes de conservation et/ou hôtes alternatifs : cet acarien est capable de se maintenir toute l’année sur différents hôtes cultivés ou non, en zone tropicales ou subtropicales.
Stades de développement : Quatre stades se succèdent au cours du cycle biologique de cet acarien : œuf, larve, nymphe et adulte. La durée du cycle de l’œuf à l’adulte est de 4 à 5 jours en périodes chaudes, elle est supérieure à 7 voire 10 jours si les températures sont plus fraîches.
Les œufs situés en particulier à la face inférieure des jeunes feuilles, voir des jeunes fruits, sont ovales et légèrement aplatis et mesurent jusqu’à 0,07 mm.Ils éclosent en 2 3 jours et donnent naissance à des larves peu mobiles, de très petite taille, hyalines et disposant de 3 paires de pattes. Celles-ci se nourrissent durant 2 à 3 jours et se transforme en pupe ou nymphe, montrant déjà 4 paires de pattes. Les adultes émergent 2 à 3 jours après ; ils sont de forme elliptique, les femelles mesurent jusqu’à 0,3 mm de long en fonction des auteurs alors que les mâles sont de moitié plus courts. Ils sont translucides après émergence, les mâles devenant progressivement jaunâtres à bruns, les femelles vert-jaunâtre, et disposent de 4 paires de pattes, la quatrième paire étant de taille réduite chez la femelle. Ces dernières ont une durée de vie d’une dizaine de jours et pondent en moyenne de 2 à 5 œufs par jours.
- Dispersion dans la culture : les adultes de cet acarien, qui ne peut pas voler, se déplacent sur de courtes distances, les mâles étant plus mobile que les femelles. Il est surtout disséminé dans la culture par le vent, les animaux et les insectes (en particulier les aleurodes), mais aussi les ouvriers et leurs outils au cours des opérations culturales.
- Conditions favorables de développement : Il apprécie plutôt les températures avoisinant les 25°C et les conditions humides. Une génération a lieu tous les 7 jours à 27°C, la reproduction ne se déroulerait pas à des températures inférieures à 13 °C ou supérieures à 34 °C. Cet acarien n’apprécie pas la lumière directe, il a donc tendance à coloniser les endroits à l’abri.
- Méthodes de protection
Le contrôle de P. latus est assez difficile car la présence de cet acarien est souvent détectée trop tardivement dans les cultures. Malgré cela, il est souhaitable de mettre en place bon nombre des méthodes de protection proposées pour contrôler l’acariose bronzée sur tomate :
- tenter d’éradiquer le ou les premiers foyers en éliminant les premières plantes atteintes et/ou en traitant localement ces dernières et les plantes environnantes. Pour être efficaces à l’égard des tarsonèmes, les applications devront faire intervenir un volume important de bouillie et ceci avec suffisamment de pression afin d’accéder au « cœur » de la végétation. Il conviendra de contrôler dans le temps l’efficacité des traitements (notons qu’aucun pesticide n’est autorisé pour un usage tomate dans e-phy et que P. latus a développé dans le monde une résistance à plusieurs pesticides) ;
- traiter les plantes avant arrachage en présence de populations élevées de ravageurs ;
- enlever et détruire les débris végétaux et les résidus de culture ;
- lessiver à l'eau et traiter les parois des abris, les poteaux, les allées bétonnées avec un insecticide ou un acaricide de contact ;
- désinfecter le matériel utilisé en serre (système goutte-à-goutte, caisses) ;
- contrôler la qualité sanitaire des plants avant et durant leur introduction dans l'abri ;
- désherber la serre et ses abords ;
- raisonner la protection chimique*, en particulier si vous utilisez des auxiliaires ;
- plusieurs auxiliaires ont été expérimentés pour contrôler les populations de P. latus : Amblyseius swirskii, Amblyseius barkeri (Neoseiulus barkeri), Amblyseius californicus (Neoseiulus californicus), Euseius stipulatus, Typhlonomus ovalis...
- Certaines substances naturelles d’origine végétale et minérale ont aussi été testées à l’égard de P. latus, notamment de l’argile fine en suspension.
- il existe des solutions dites de biocontrôle, la liste (non exaustive) des matières actives homologuées et leur guide d'utilisation sont disponibles ici.
* Lutte chimique : Le nombre de pesticides disponibles pour un usage donné évoluant en permanence, nous vous conseillons de toujours confirmer votre choix en consultant le site e-phy du ministère de l’agriculture et de la pêche qui est un catalogue en ligne des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages, des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en France. Cette remarque est également valable pour tous les produits biologiques à base de micro-organismes ou de substances naturelles.