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Méthodes de protection

La lutte contre Fusarium oxysporum f. sp. radicis-lycopersici n’est pas aisée car ce champignon se conserve très longtemps dans les sols et les substrats, et il les recolonise très rapidement lorsque ceux-ci ont été désinfectés. Aussi, pour que la maîtrise du champignon tellurique soit efficace, il conviendra d’associer toute la batterie de mesures et de méthodes, permettant de l’éliminer ou de limiter son développement.

 

  • En cours de culture

 

Aucune méthode de lutte n’est suffisamment performante pour contrôler cette maladie lorsqu’elle est constatée en cours de culture. Afin de maintenir les plantes vivantes le plus longtemps possible, il convient de les traiter rapidement, en arrosage au pied ou via le système d’irrigation localisé, avec un fongicide* homologué (e-phy). L’efficacité de ces traitements n’est pas toujours importante. Il convient de savoir que des souches de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici résistantes aux benzimidazoles ont été détectées dans des cultures où ces produits ont été employés de façon répétée.

En sol, le buttage des plantes permet l’émission de racines adventices qui viendront suppléer les racines malades plus ou moins pourries. En culture hors sol, de la tourbe peut être apportée au collet des plantes, pour la même raison que précédemment. Dans ce type de culture, il faut récolter les premiers fruits rapidement afin de « soulager » quelque peu les plantes. Les plantes ne doivent pas être irriguées avec une eau trop froide.

En cours de culture, les premières plantes malades peuvent être éliminées avec soin. Pour cela, il faut les placer dans un sac plastique afin d’éviter tout contact avec les autres plantes saines. Elles seront rapidement détruites par la suite. Si un foyer est présent dans la culture, il peut être balisé, mis en quarantaine et travaillé séparément. Les chariots et les récipients de récolte ne transiteront pas par ce foyer.

Les visiteurs ne seront pas admis dans les zones atteintes. Des pédiluves seront installés devant chaque entrée, la solution désinfectante devant être renouvelée fréquemment.

Il est assez courant d’enfouir les résidus de culture dans le sol après la récolte. Les tissus végétaux enterrés sont abondamment colonisés par F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici qui y produit de nombreuses chlamydospores. L’élimination des plantes avec leur système racinaire limite ce phénomène et contribue à réduire la quantité d’inoculum laissée dans les parcelles. Les débris végétaux ne seront pas entassés et conservés à proximité de parcelles ou d’abris où seront cultivées des tomates par la suite. En effet, ils constituent des sources d’inoculum importantes qu’il y a lieu de détruire le plus rapidement possible. Dans le cas contraire, le vent, les intervenants, certains insectes « se chargeront » de faire pénétrer F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici dans les cultures. Si on ne peut pas faire autrement, le tas de débris sera recouvert d’un film plastique afin de constituer une barrière mécanique.

 

  • Culture suivante

 

On évitera de produire des tomates dans des parcelles déjà affectées. Des rotations culturales avec des plantes non hôtes (comme le maïs ou des plantes similaires) contribueront à prévenir l’apparition de cette maladie ou la limiteront. Pour être efficaces, elles devront être suffisamment longues. On évitera de faire entrer l’aubergine, le poivron et certains des légumes cités précédemment en rotation avec la tomate. On leur préfèrera la laitue qui ne semble pas sensible.

En culture sous abris, en hors-sol notamment, l’ensemble de l’exploitation devra être désinfectée afin de la débarrasser du maximum de propagules plus ou moins adhérentes, susceptibles de contaminer les nouvelles plantes. Il conviendra donc de désinfecter la surface des structures internes des abris. Le formol, excellent désinfectant de surface qui agit très rapidement sous la forme de vapeur, est parfois utilisé. D’autres produits peuvent être utilisés (e-phy). Les sacs, les cubes de substrats et les autres matériaux ayant pu être contaminés devront être éliminés. S’ils sont réutilisés, ils devront être désinfectés auparavant.

La désinfection du sol ne présente qu’une efficacité éphémère et peu satisfaisante. En effet, comme tous les Fusarium, le Forl recolonise très rapidement les sols désinfectés. En plus de la vapeur, plusieurs fumigants peuvent être utilisés : chloropicrine, métam-sodium, dazomet… La nature du sol et sa teneur en matière organique influencent l’efficacité de ces fumigants. Le cyanamide de calcium permettrait de réduire l’inoculum du sol. L’association de métam-sodium et de formol a donné de bons résultats en Israël. L’efficacité de la désinfection des substrats de cultures hors sol est souvent aléatoire. Il est plus judicieux de les éliminer et de repartir avec un substrat neuf. Le sol de la culture devra être bétonné ou recouvert d’un film plastique. Celui-ci devra être remplacé dès que des déchirures apparaîtront. Cela permettra d’isoler la culture du sol et d’éviter les contaminations aériennes via les poussières de sol notamment. Pour les mêmes raisons, les réservoirs d’eau, les bacs de solution nutritive devront être couverts.

La solarisation présenterait aussi une certaine efficacité. Elle serait parfois assez partielle, car F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici est moins sensible à la chaleur que d’autres bioagresseurs telluriques comme Pythium spp., Sclerotium rolfsii par exemples. Aussi la solarisation est-elle souvent associée à d’autres moyens de lutte biologiques (des champignons antagonistes comme Trichoderma harzianum) ou chimiques (des fumigants à faible dose de dazomet, de métam-sodium…).

L’ozone, employée par ionisation d’eau et associée à Trichoderma sp., réduirait les attaques de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici. Certains composts limiteraient également ses effets. Des substrats à base de fibre d’écorce de Chamaecyparis obtusa ou de Cryptomeria japonica ralentiraient son développement. L’incorporation de certaines plantes entières dans le sol, comme du riz, du soja ou de la laitue réduirait l’incidence de ce Fusarium sur tomate.

Il sera indispensable d’utiliser des plants sains. Ils devront être produits avec un substrat sain, et les mottes ne seront pas posées à même le sol, en pépinière. Les pépinières ne devront pas être localisées à proximité de parcelles ou dans des abris où des cultures ont déjà été touchées par la maladie. Des contaminations aériennes des plants sont toujours possibles. On évitera de trop arroser les plants, de les blesser à la mise en place au champ. Les plateaux, les caisses réutilisés pour contenir les plants seront désinfectés. On sera particulièrement vigilant sur leur qualité sanitaire. Ceux provenant d’exploitations touchées par cette fusariose ne seront pas acceptés. Les plants seront installés dans un sol réchauffé, un paillage plastique ne sera mis en place qu’à ce moment-là.

Les outils servant au travail du sol dans les parcelles contaminées seront bien nettoyés avant leur emploi dans d’autres parcelles saines. Il en sera de même pour les roues des tracteurs. Un rinçage soigneux à l’eau de ce matériel suffira souvent à le débarrasser de la terre infestée.

Il faudra se méfier de la qualité sanitaire de l’eau utilisée pour la préparation de la solution nutritive et/ou l’irrigation des plantes, surtout si elle provient d’un canal d’irrigation, d’un cours d’eau, d’un bassin… ayant pu être contaminés.

Si la solution nutritive est recyclée, elle pourra être désinfectée. Plusieurs méthodes pourront être utilisées : la chloration, l’iodation, l’ozonation, la biofiltration, les rayons UV, la photocatalyse au TiO2… Le spectre d’efficacité de ces différentes méthodes semble assez large et intègre plusieurs champignons, notamment ce Fusarium. Elles ne donnent pas toutes entière satisfaction. En effet, certaines d’entre elles révèlent une efficacité partielle et parfois des inconvénients pour les systèmes de production (interférence avec la nutrition minérale, notamment ferrique…). Les conduites du réseau de goutte-à-goutte devront être nettoyés ou remplacés. Les dépôts seront éliminés avec une solution acide, et le circuit désinfecté sera ensuite rincé à l’eau. Dans les serres où la solution nutritive est recyclée, les mesures prises seront plus importantes. Le circuit devra être désinfecté à plusieurs reprises afin d’être certain de se débarrasser de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici.

On évitera d’utiliser de l’azote ammoniacal, et on maintiendra le pH du sol à 6 ou 7. Les piquets devront être désinfectés.

La mise en évidence de contaminations aériennes via des blessures oblige maintenant à envisager une protection du feuillage et à ne pas négliger la sporulation possible du champignon sur la tige à l’origine de l’inoculum aérien.

La méthode la plus efficace pour contrôler cette fusariose racinaire consiste à utiliser des variétés résistantes. Un gène dominant « Frl », issu de Lycopersicon peruvianum et situé sur le chromosome 9, confère une résistance de haut niveau. L’association étroite de ce gène avec « Tm-2 » (gène de résistance au virus de la mosaïque du tabac) a permis de faciliter la sélection des variétés résistantes. Plusieurs portes-greffes tomate de type KNVFFr sont maintenant résistants à cette fusariose. Ils permettent de cultiver, dans des sols infectés et en culture hors sol, des types variétaux pour lesquels on ne dispose pas encore de variétés résistantes.

Plusieurs bactéries interfèreraient avec ce Fusarium racinaire, soit directement, soit par l’intermédiaire de la tomate : Pseudomonas fluorescens (dont l’efficacité est influencée par le zinc), P. chlororaphis, P. putida (induirait une résistance systémique acquise à F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici chez la tomate), Bacillus megaterium et Burkholderia cepaciae (contrôleraient F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici en association avec un apport de carbendazime).

De plus, plusieurs champignons ont permis de maîtriser plus ou moins bien le développement de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici, et donc l’expression de cette maladie racinaires : Trichoderma harzianum, des Fusarium spp. non pathogènes (des souches avirulentes de Fusarium oxysporum et de F. solani), une souche binucléée et hypovirulente de Rhizoctonia solani, Pythium oligandrum, Gliocladium roseum (seul ou en association avec un apport de bénomyl). Ajoutons que des champignons mycorhiziens appartenant au genre Glomus (G. intraradices…) réduiraient la sévérité des symptômes de cette fusariose racinaire sur tomate.

Signalons enfin que plusieurs huiles volatiles et substances non volatiles influenceraient négativement le développement de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici sur tomate.

Les caractéristiques culturales et morphologiques de F. oxysporum f. sp. radicis-lycopersici ne sont pas différentes de celle de F. oxysporum f. sp. lycopersici.


Lutte chimique : Le nombre de pesticides disponibles pour un usage donné évoluant en permanence, nous vous conseillons de toujours confirmer votre choix en consultant le site e-phy du ministère de l’agriculture et de la pêche qui est un catalogue en ligne des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages, des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en France. Cette remarque est également valable pour tous les produits biologiques à base de micro-organismes ou de substances naturelles.

Dernière modification : 12/02/2013
  • Auteur :
  • D Blancard (INRAe)